black celebration / mikey

mikey renton
you hunt for love, you electioneer.
© editors - you don't know love

never trust or love a wild thing.

âge ~ ils ont appelé ça un sacre, c’était une retraite. à quarante ans, le stade rend un dernier hommage à son capitaine historique. il jouait plus vraiment, ça faisait un moment qu’il prodiguait ses conseils depuis le banc des remplaçants. entre la clameur populaire d’une victoire à domicile et le silence d’une défaite dans les dernières minutes du match. ils ont dit que c’était trop jeune [la presse] ; et quand il a perdu le championnat, il s’est très nettement vu, batte de baseball à la main, fracasser les crânes vides.
date et lieu de naissance ~ le fief du king qui n’attire plus qu’un nid de touristes et de perches à selfies de new york à hong kong. c’est pas très intéressant le tennessee, et ça fait mauvais genre auprès du petit bourgeois. auprès de ceux qui pensent encore qu’il a deux fois plus à prouver que les autres. le soleil fait fondre la glace du 2 février 78, le plus jour oublié de l’histoire, tout le monde s’en fout, même lui.
nationalité ~ américain, XXL de la chance de cocu, le monde où tout devient possible; où les critiques assassinent un homme par jour et où les femmes sont jamais suffisamment compétentes pour avoir le job. métier ~ la tête et les yeux, planqué sous son blouson et sous sa casquette - il est tantôt silencieux, tantôt agité comme un lion depuis son banc. mikey, il vit les matchs par procuration en rêvant secrètement d’enfiler de nouveau ses crampons. coach ; celui qu’on félicite à peine mais qui s’fait insulter de tous les noms en cas de défaite. second couteau, il a jamais été le choix numéro 1 des yankees de NY, pourtant il est quand même là, transfuge des red sox de boston. lanceur énervé aux balles fuyantes, pas besoin d’être ambidextre pour soulever une coupe nationale. statut civil ~ elle s’est dit que c’était à cause de la grossesse, qu’un truc avait vrillé sans qu’elle ne comprenne pourquoi. il a arrêté d’la toucher du jour au lendemain, des excuses toutes faites pour partir au pays des songes avec rage et frustration. quand leur fils est né, c’était déjà fini. il sourit toujours sur les photos mikey, mais ce jour-là il était réellement heureux. il a demandé le divorce trois mois plus tard, il a jamais aimé sa femme [mannequin pour playboy, allure cadavérique, pas si conne que ça], il avait pas prévu de la détester. son divorce a fait les choux gras de la presse people. depuis c’est le calme plat, depuis il prend une posture défensive pour protéger sa vie privée ; faudrait pas qu’on capte qu’il parlemente et qu’il se fout à poil sur des sites de rencontre gay. statut monétaire ~ il a jamais retourné une chambre d’hôtel pour le fun, ni balancer son argent par la baie vitrée. le jour de paye il ne se précipite pas dans une concession automobile. il sait plus quoi acheter mikey, il a tout. une femme de ménage pour ranger son merdier, le bateau qui a jamais décollé du port de new york depuis qu’il l’a acheté, un site de paris sportifs en ligne, les tuyaux pour spéculer en bourse, des costumes sur mesure qu’il déteste porter mais qui lui donnent curieusement le droit de faire tout et n’importe quoi. groupe ~ save the last chance.

all night long slow down the song

curveball / bled pourri pas si mal, coin privilégié des touristes qui ont un peu plus de pognon. qui veulent écouter le king; voir le déhanché suggestif qu’on filme même pas à la télé. ville suspendue dans l’temps, bloquée quelque part dans les 60s. ralenti misérable où il jette ses premières balles par ennui. faut pas bien qu’il s’occupe mikey -michael- après l’école. qu’il noie son complexe d’infériorité dans quelque chose. mikey il est pas brillant et ses parents sont convoqués tous les quatre jeudis. il est pas méchant dans l’fond, mais il a à cœur d’amuser tous ses copains dès qu’on lui tourne le dos. insolent, flemmard ou complètement débile. on l’a même envoyé chez le psy, puis faire un test de QI. et tout l’monde se casse la mâchoire en voyant un 1. un 6. et un 0.
screwball / éducation catholique, l’église qui lui fait louper les dessins animés le dimanche matin. la petite famille qui afflue pour sa communion quand il est juste heureux d’obtenir les dernières baskets à la mode. il a jamais compris l’message, ou de travers mikey. il s’est dit que la paix dans l’monde c’était pas mal, il a appris l’humilité et la valeur du travail. il s’est arrêté à la troisième semaine. après, il s’est mis à boire l’eau bénite de la toute petite fontaine et à manger le panier d’hosties.
forkball / mikey il a très vite bavé devant le club de baseball de son école. il pouvait regarder les autres gamins jouaient pendant des heures. mikey c’est le gosse qu’on avait pas besoin de réquisitionner pour ramasser les balles. il était là à chaque entraînement, prostré, à imiter les mouvements du poignet de ses aînés. mais mikey, il avait tout du gringalet qu’on laisse sur le banc. retard de croissance, on l’remarque pas le p’tit. c’est même le pire frappeur de tous les temps. alors il cire le banc, un an, deux ans, avant qu’on ne le capte enfin. petit malin qui utilise sa droite puis sa gauche, qui sait plus avec quelle main écrire à l’école, qui ridiculise bientôt toute l’équipe de son école et qui insulte ses coéquipiers sur le terrain. mikey, il a perdu trois finales régionales d’affilées, ça l’a rendu fou mais il a décroché une bourse pas dégueulasse pour aller se frotter aux équipes universitaires.
palmball / noir et or, il intègre l’équipe des tigers de missouri tout en rêvant de la côte est et des dodgers de LA mais c’est bien à NY qu’il atterrit et avec qui il gagne cinq fois le championnat. brave gamin qui devient l’idole des stades d’un bout à l’autre des états-unis et à qui on offre rapidement des contrats aux montants mirobolants. il perd un peu pied mikey, épouse une fille sans envergure qui pose régulièrement nue pour playboy. mises en scène qui fout en l’air son image, modèle familiale qu’il tente vainement de reproduire malgré lui. le mensonge est dans le baiser, dans ce besoin viscéral d’avoir un enfant peu importe la manière. parce que ce mariage, il s’en fout mikey. il a jamais été intéressé par une seule femme dans sa vie. il a jamais été intéressé par personne avant la naissance de son fils dalton.
knuckleball / l’gosse a pas une cuiller d’or dans la bouche mais une louche. et si la forme fait des envieux, le fond n’a pas d’odeur. le fond est invisible, creux, vide. résolument pas là, papa, il était ailleurs. papa il avait l’amour des autres, d’inconnus, de ceux qu’il a toujours détesté dalton. baseball de merde. déplacements à la con. la victoire d’une défaite. le besoin de lui rappeler que c’est un fils de pute, que sa mère est bonne ici et là. guerre froide entre l’un et l’autre; son père a pas l’temps - sa mère non plus. désordre affectif, arrangements pourris devant monsieur l’juge, puis insultes, reproches et ribambelle d’avocats.
beanball / il y a l’odeur de plastique qui me revient, d’abord. l’odeur du neuf. puis les détails sur le cercueil, ton cercueil dale. la disposition des fleurs que j’ai pas pu choisir. j’avais pas le cœur à faire du shopping funéraire ce jour-là. sur le moment j’ai regretté, elles étaient quand même immondes ces fleurs. tu méritais pas- ces couleurs. tu méritais que j’pleure un peu plus, que j’garde tes affaires, que j’sois là. que j’insulte pas ta mère de pute après la cérémonie [quelle surprise].
- ça va aller ?
- c’est que des cartons. pourquoi ça irait pas ?
j’passe cent fois devant ce couloir, la porte est grande ouverte. le corps flotte au-dessus du sol, lâche, lourd. je continue quand même à discuter avec le directeur sportif du club, j’sais plus de quoi mais ça dure bien deux heures. deux heures entières. et j’raccroche même pas pour toi, j’raccroche parce que j’ai faim. c’est n’importe quoi.
c’est n’importe quoi comme on accorde une importance toute particulière aux premières fois.
la première fois - que tu dis papa, que tu te tiens sur tes deux jambes comme un miracle, que tu m’laisses pas dormir à cause de tes foutues dents [je t’ai jamais autant détesté], que tu vas à l’école en hurlant, que tu patines sur ton vélo, que j’marche sur un lego en jurant sur tous les saints. j’sais pas pourquoi ça devient des bons souvenirs, ces dimanches de perdus à chercher ta carte de cantine, à t’entendre dire que j’écoute que des trucs de vieux [c’est le cas].
et je m’en fous - j’ai juste peur d’oublier le son de ta voix, ton visage.
alors c’est pas que des cartons, bien sûr. mais si j’te garde dale, ça sera un putain de chaos et j’suis désolé.
j’suis désolé.
j’suis désolé de pas t’garder.
j’suis désolé de faire exactement comme d’habitude.
de te mettre sur le côté ; en attendant que ça passe. j’peux pas gérer ça ;
j’sais pas, j’ai jamais su.
shine ball / sa webcam est un peu naze, exprès. faudrait pas qu’on mette un nom sur son visage. faudrait pas que ça apparaisse sur le journal du lendemain; les coming out c’est bien pour les autres, pour les artistes. c’est pas tout à fait la même chose sur le pitch. l’exemple n’est pas pédé, point barre. l’exemple ne flirte pas en ligne avec d’autres mecs en s’foutant à poil. l’exemple porte une casquette. l’exemple est curieux de tout, des autres - mais pas longtemps. y a l’amour fantasmé dans sa poitrine, les noms qui se succèdent comme un mauvais médicament. il aimerait rester, que le matin ne le chasse pas comme un étranger, défaire sa ceinture de sécurité pour finir la tête dans le pare-brise.

cause we're ready for the fame.