enjoy the silence - nana

aime-moi,
aime-moi,
aime-moi,

vie spectaculaire qui tourne dans l’vide. qui décroche pas une seule feuille en automne.
y a tout l’monde qui se barre,
le mauvais chiffre en rouge de placardé, ça lui fait mal aux yeux.
y a les mains de tout l’monde pour le toucher, pour frapper dans son dos, pour tendre le couteau.
les micros qui se tendent de questions, qui tournoient autour de son cadavre.
ils vont bientôt demander sa tête, il le sent, il en est convaincu. tôt ou tard, il sera remercié pour ses valeureux moments. et puis,
qu’est-ce qui se passe après ? on oublie. on oublie.
la rupture du ligament croisé du genou. il a pas marché pendant trois mois mikey, le quatrième il était déjà le gant au poignet.
il a fait un match foireux, il a encore la cassette, il s'la passe dès fois. c’est encore sur youtube. il est retourné faire banquette au bout de dix minutes.
qu’est-ce qui se passe après ? on oublie. on oublie.  
les réponses toutes faites, qu’il balance. il essaie mikey, de faire taire le silence. de monter le film dans sa tête, il y a des lignes droites et des diagonales. des positions basses et de mauvaises courses.
il va pas donner ses joueurs en pâture aux journalistes, alors il bronche pas, il hoche vaguement la tête quand on élève la voix.
quand il sort (indemne ??) de la meute, il y a que des visages dépités pour le cueillir à l’entrée du vestiaire. l’aigreur de la défaite et les mains moites. les doigts qui se brusquent. les doigts qui font poings. la tête basse. et mikey, il applaudit. il applaudit pour s’foutre de leurs gueules. il applaudit pour l'orgueil, il applaudit par rage aussi.
il va tout revoir, tout. le tableau sera blanc de nouveau.
il va jouer à dieu, mikey, sur son tableau. faire un choix c’est mettre de côté. faire un choix c’est prétendument détester.
comme on peut le détester suffisamment pour le huer. pour faire mauvaise banderole juste en face de lui. que le message soit suffisamment visible, diffusé surtout.
« tu fais d’la merde renton »

il veut juste rentrer chez lui, et il est le dernier à sortir mikey - le premier et le dernier. il a arraché toutes les fleurs du champ. il reste que dalle. quand il arrive au parking, il y a plus que sa caisse. il y a plus que sa caisse pour faire mauvais genre.
ça fait un trou,
un méchant trou,
entre les deux yeux. sur le pare-brise, la piste aux étoiles. c’est presque de l’art qu’il s’dit. puis il laisse tomber ses affaires. son ordi. son cartable. il prend une photo avec son portable;
cherche la caméra / il est mort dans l’angle.
il appelle un taxi pour rentrer, patiente dix minutes sur le trottoir - y a personne qui s’arrête.
il a pas bouffé, il a regardé les autres mikey, il a regardé le score qui décollait pas.

puis il est rentré, chez lui. son chez lui-bordel. pas son bordel, c’était plus vraiment son bordel. c’était plus vraiment chez lui. peut-être qu’il régresse à cause de nana, à cause des messages stupides qu’il lui envoie au boulot quand il bosse. il passe au-dessus des feuilles.
- juanita est pas passée ? c’est dégueulasse putain. il jette son cartable sur le fauteuil puis s’assoie juste à côté.
pas de « bonjour ».
pas de « tu as passé une bonne journée ? ».
pas de bisou grotesque. pas de bisou pansement. il s’en fout mikey,
- j’savais pas que t’étais là ce soir, la prochaine fois t’es gentil, tu demandes.
il le fixe, il fronce un peu les sourcils. il comprend pas à quel moment il a demandé à nana d’habiter à mi-temps chez lui. d’où ça vient ? elle sort d’où cette routine emballée ?

y a des trous dans son sourire. y a des trous dans le creux de ses joues quand il dit quelque chose de bien. un pourboire jeté en pleine tronche, un merci dépêché. la lumière qu’à pas ramener l’ange suffisamment tôt pour sauver sa soirée. il a l’mauvais cœur, le regard qui déraille sous ses lunettes noires. les doigts qui se crispent à chaque chirurgie, qui suturent mal la défaite. si il gagne pas le championnat mikey; il y aura plus personne pour lui passer de la pommade dans l’dos. il écrira un livre nul à propos de son amour immodéré pour le baseball et les putes (c’est vendeur). il voit pas les couleurs. il sait pas différencier un chef d’œuvre d’une croûte qu’on aurait exposer un premier avril dans un musée. c’est pas trop mal vu du ciel, ce que fait nana. c’est pas trop mal de mettre toutes ces feuilles dans un crématorium. de faire un feu avec, de mystifier tout l’bordel qui lui échappe. il a l’impression d’être au mauvais endroit mikey, d’être au mauvais endroit chez lui. il est dépassé par tout, ébranlé par tout. la faute à cette foutue banderole qu’est restée sous son nez pendant trois heures et demie. renton démission. et maintenant il donnait raison, à tous ces connards.
fallait qu’il pense,
qu’il pense à quelque chose de mieux; fallait qu’il regarde les trois derniers matchs.
(encore)
(dix heures de visionnage, encore)
sauf qu’il y a cette fresque, débile, qui traîne là. et là. et là.
il prend une grande inspiration mikey, il allume la télé sans prendre la peine de dire bonjour. écoute c’que ses bourreaux ont à lui reprocher sur le câble.
- t’as passé la nuit dernière ici ok; j’ai jamais dit que j’voulais passer la nuit d’aujourd’hui avec toi. il zappe, passe à la chaîne suivante. renton démission. c’est pas l’propos, mais c’est ce qui lui revient dans la tête à chaque fois - il baisse le son mikey, mais l’image colle à sa rétine. c’est même pas la caisse, ou faire l’trottoir sous la flotte en attendant désespérément un taxi pour rentrer, c’est même pas son estomac malade. c’est cette merde peinte noir sur blanc.
alors il passe, comme un fantôme. boulet sur du vide en dévisageant nana.
- et il y a pas de contrat à signer non plus. j’ai peut-être du fric mais c’est pas inscrit pigeon sur mon front. il réfléchit plus au sens, il veut juste être tout seul et qu’on lui foute la paix. s’endormir piteusement sur le canapé jusqu’au lendemain sans qu’on ne vienne l’éblouir comme un soleil. c’est pas l’moment de briller. la lumière ça s’réfléchit pas si bien que ça, c’est un mensonge. il va chercher une ramette, pas pour faire des dessins. il sait pas trop ce qu’il va en faire, peut-être bien qu’il va en faire des confettis pour son licenciement. d’avance. c’est bien de prévoir aussi.

il détaille pas; ni le ton ni les plis qui font l’ennui et le désordre. les plis qui saccagent une discussion. la main qui plonge à travers l’écran. le feu crépite dans sa poitrine comme le pire alcool qui l’aurait vu naître. qui se serait foutu d’sa gueule juste au-dessus d’son berceau. fée sous acide qui oublie la bénédiction des braves. faut croire que ses parents ont oublié d’se confesser avant noël ou pâques. que michael, c’était être plus con que la moyenne. que c’était le gâchis. il aurait dû faire avocat ou médecin. putain. ou non, il aurait dû devenir comme ces mentalistes-vedettes qui passent à a télé, à faire deviner un chiffre entre zéro et dix. le genre de génies qui prospèrent et qu’on applaudit.
des applaudissements.
pas de l’amour.
des applaudissements.
de l’amour désintéressé.
des applaudissements.
[t’es génial mec][et des cœurs sur des pancartes]
[des autographes][et des photos]
du bon sentiment, les clopes qui se tendent, les verres, la coke maintenant.
il devrait faire ça: s’enfiler une royale ligne directement dans l’pif - et ensuite, se tirer. faire le tour du monde. tout seul. ou avec quelques putes.
les putes c’est bien, ça parle pas beaucoup. ça écoute, ça réconforte si il faut. c’est discret. ça fait pas d’bruit. c’est bien les putes.
nana < putes.
de l’amour à en étaler partout, à faire des dessins dans le creux de ses yeux. à enfiler des perles d’or aux mensonges. c’est presque beau. ça trompe le nord, et toutes les autres directions. comme ses joueurs, il sait plus après quelle balle il court mikey. il s’gratte le poignet nerveusement mikey. ça l’énerve ce ton qui s’en fout. ce ton tout calme. ce ton qui ne dit rien. ce ton qui fait comme si c’était lui l’problème. ce ton qui dit: « tu es le problème et moi la solution. » syndrome du sauveur de merde.
il a rien demandé à personne. ni plaintes, ni excuses.
si t’es pas la pute c’est que t’es l’pigeon alors. simple, logique.
applaudissements.
il passe son pouce sur ses lèvres à nana; supplice qui fait la gueule. supplique qui pince la peau et les coins. qui devine pas la balle blindée entre ses doigts. il dit rien mikey - mais il l’empêche de causer. de répondre. de faire autre chose que marionnette suspendue à ses fils.
tu m’apportes que dalle, tu captes ? tout ce que tu m’donnes c’est de la merde. du vide. tu prends et tu m’donnes que dalle. et maintenant quoi ? tu t’crois indispensable ? t’es pas une pute. t’es pire que ça.
il s’essuie sur sa joue mikey, avec mépris.
tu vois ça ?
il prend la pochette.
tu vois ça ?
il arrache les feuilles devant lui.
ça c’est pas mon putain d’cœur. non. c’est le travail d’un ado attardé qu’on a élevé au rang d’artiste, tout ça parce qu’il sait dessiner un cul. non vraiment, félicitations, je m’incline devant ton immense talent.

il fait des cotillons mikey - il fait la fête.
il fait des pétales de roses mikey - il manque la fête.

mon problème c’est que t’empestes mon espace de tes conneries et que j’ai pas l’temps pour ça. et que merde, faut t’le dire en quelle langue ? CASSE-TOI PUTAIN !