When I first saw you (ft. Marlon)

T’es plongé dans tes pensées. Tu sais que la fille à qui tu parles depuis des mois sur une application pour fan de littérature n’est pas loin de toi. Tu sais qu’elle t’observe. Tu sais que tu t’es pris d’affection pour une inconnue quand tu lui as filé ton numéro de téléphone, pour que vous puissiez échanger plus facilement par texto. Tu sais qu’elle est là. Qu’elle te regarde. Tu te sens limite mal à l’aise de savoir qu’elle peut te voir, mais toi non. Alors tu fais mine que tu ne stresse pas. Que cette attente ne t’atteint pas. Soudain, tu sens une présence près de toi. Un léger froid. Quelque chose qui te cache du soleil. Tu entends ton prénom. Tu ouvres les yeux. Te redresse. « Lara je suppose ? » Tu lui souris avant d’enlever complètement les écouteurs de tes oreilles. D’éteindre la musique. De laisser ton téléphone dans ta poche de pantalon. « Content de faire enfin ta connaissance, je m’attendais à ce que tu sois une fille à lunette, avec une petite jupe plissée, bonne écolière quoi ! » Tu ris légèrement. Tu ne l’imaginais pas aussi douce. Aussi belle. Mais tu ne peux pas lui dire que tu l’as trouve belle. Elle penserait que tu la drague. Or de question. Peut-être plus tard la drague.

Il paraît impressionnant lorsqu’il se redresse, il est grand, plus qu’elle, et musclé. Et elle se tient là, debout, toute frêle, avec l’impression que ses jambes flageolantes vont bientôt la lâcher. Elle hoche la tête et lui rend son sourire, un petit sourire timide, rendu encore plus innocent par le rouge qui commence à lui monter aux joues. N’en pouvant plus, elle finit par s’asseoir en tailleur à côté de lui, plus pour sa propre sécurité que par envie, parce qu’elle a pas envie de s’effondrer minablement devant lui. Elle replace une mèche de cheveux rebelle derrière son oreille et se crispe un peu. Lunettes et jupe plissée ? Elle rit nerveusement. Je porte des lunettes quand mes yeux fatiguent mais je ne porte plus de jupe plissée depuis bien longtemps. Tu aurais préféré.. ? Question qu’elle ne pensait pas poser mais qui lui échappe. Elle passe une main dans ses cheveux et le regard par en-dessous. Tu n’as pas cours ? Elle pensait pas se sentir si impressionnée, pourtant sa voix tremble, tout comme ses petits mains qu’elle enfouie entre ses jambes pour les rendre invisibles au blond qui lui fait face. Elle ne pensait pas le rencontrer, jamais. Elle croyait qu’il se lasserait de discuter avec elle, ou bien qu’il trouverait une fille dans sa vraie vie et qu’il cesserait de lui répondre avec le temps.

Elle s’assoit à tes côtés après t’avoir longuement observé. Tu sais qu’elle ne t’imaginait pas comme ça. Même pas du tout. T’es assez impressionnée par sa personne. Tu sais qu’elle est aussi impressionnée par toi. Tu souris bêtement en la regardant. « Préféré je ne sais pas, je pense que j’aurais pris peur si tu étais réellement arrivée comme ça ! Mais je suis plutôt surpris, tu es très jolie. » Allez premier compliment ! Tu attaques la drague, tu le sais, tu le sens, mais il ne faut pas trop lui faire peur quand même, tu risquerais de la faire fuir, alors que ce n’est pas ton objectif. « Non j’ai pas cours, aujourd’hui c’est journée de repos ! Et toi, je sais que tu devrais être en cours, tu n’as quand même pas sécher pour venir me voir ? » Tu poses la question, mais tu sais que tu as la réponse. Tu sais qu’elle a lâché les cours pour te retrouver. Pour enfin mettre un visage sur un prénom. Une personne sur une tonne de discussions.

Le rouge qui lui monte aux joues et colore son visage quand il la complimente, elle n’arrive pas à répondre, incapable de prononcer quoique ce soit. Elle se trouve un peu pathétique de se retrouver comme ça devant lui alors elle lui sourit timidement. Merci. Ses petites mains qui jouent avec l’ourlet de son t-shirt alors qu’il la prend en plein sur le fait de sécher les cours. Elle sait pas trop quoi répondre, elle a assez d’avance pour rater quelques heures, bien que ça ne lui ressemble pas. Elle repense au message de son père la dernière fois, qui lui disait combien il était fier et comment lui et sa mère avaient travaillé durs pour lui assurer un bon avenir et lui permettre d’aller à la fac. Alors elle se mord la lèvre et évite son regard lorsqu’elle avoue. C’était mon dernier cours et j’ai un peu d’avance dans cette matière. Elle vient clairement d’avouer qu’elle a séché les cours pour le rencontrer lui, comme si elle révélait son attachement envers lui, un aveu de faiblesse auquel elle espère qu’il ne ferait pas attention. Tu écoutais quoi ? Demande-t-elle pour changer de sujet, pour ne plus être au centre de la conversation.

C’est assez étrange de rencontrer une personne comme ça. Normalement, on rencontre des gens par hasard, ou bien, dans un lieu fait pour. A l’école, à notre travail, lors de nos loisirs. Au sport, au théâtre… Mais nous non, on s’est rencontré grâce à une application basé sur la littérature. Bizarre non ? Surtout quand on sait que l’on se parle depuis des mois. Que se soit sur l’application. Par texto. A travers un échange d’écrire plutôt littéraire. Aujourd’hui enfin, on se rencontre en vrai, en face à face, les yeux dans les yeux. « Tu as sécher pour moi donc ! » Tu la regarde d’un air assez fier de toi. Plutôt enjoué même. T’es content qu’elle loupe les cours pour toi, ça prouve qu’elle avait vraiment envie de te voir, que ce n’était pas simplement parce qu’elle s’ennuyait à mourir chez elle quoi. « J’écoutais une musique de Linkin Park, tu veux écouter avec moi ? » On partage cet amour pour la littérature, peut-être que l’on partagera aussi notre amour pour la musique.

Sa remarque lui fait piquer un fard, elle se sent comme une gamine qui vient de faire une bêtise et dont les parents viennent de la prendre sur le fait, pourtant elle nie la brune. Peut-être que ce cours ne m’intéressait pas tant que ça ? Elle ment, évidemment qu’elle ment et il le sait, elle lui a répété bien des fois être passionnée parce qu’elle étudie en classe. Pourtant, elle ne peut se résoudre à lui avouer, se sentant trop vulnérable en lui faisant comprendre qu’effectivement, il lui plait. Il a l’air heureux lui, en tous cas, comme si elle venait de lui annoncer une bonne nouvelle, alors qu’il n’en est rien. Elle hausse alors les épaules avant d’ajouter. Peut-être que c’était pour toi oui, ou peut-être pas. Mystérieuse, tout ce qu’elle n’est pas. Lara c’est plutôt le genre livre ouvert, néon qui clignote et qu’on voit au loin, signaux de fumée et tous les trucs ultra voyants qui font d’elle une fille incapable de cacher quoique ce soit ou de mentir. Et puis la conversation dévie et elle hoche la tête. Pourquoi pas, j’aime beaucoup Linkin Park. Voyant que le fil de l’écouteur serait trop court, elle se décale un peu et vient s’asseoir plus près de lui. Il sent bon et elle se tourne pour ne pas qu’il la voit sourire. Tu habites près d’ici ? Le regard au loin pour montrer un pseudo-détachement alors que sa curiosité brûle d’en savoir plus sur lui.

Tu dois avouer que tu es plutôt un coureur de jupon. Le genre de mec qui va à droite à gauche, juste pour tremper sa nouille. Se vider. Se faire du bien. Donner du plaisir. Tu es le genre de mec qui n’a pas besoin d’allez vers les filles. Les filles viennent à toi. Sans doute cet aspect de futur médecin qui fascine. Ou bien le compte bancaire de tes parents qui attire. Mais Lara, tu as l’impression que c’est différent. Tu n’as pas envie de juste la mettre dans ton lit. Lara finit par avouer qu’elle est peut-être venue pour toi. Elle laisse une part de mystère, mais dans le fond, tu sais ce qu’elle a vraiment fait. Il faut avouer, qu’après des mois de discussion, il est normal de finir par craquer pour une rencontre. Elle accepte d’écouter la musique avec toi, t’es plutôt satisfait, ça la fait se rapprocher de toi. Tu as de bonnes idées parfois Marlon, continue comme ça. « Oui, j’habite à Manhattan, à quelques rues d’ici quoi et toi ? Tu habites où ? » Tu vas peut-être pas l’inviter chez toi. Du moins pas tout de suite. A moins qu’elle vienne à avoir froid, tu n’auras pas d’autre solution.

Visiblement il n’a aucune idée de qui tu es, sinon il ne t’aurait pas demandé où tu vis. Le manoir MacPherson est plutôt connu par les habitants de Manhattan, c’est une grande bâtisse protégée h24 par une armée de gorilles armées et très souvent cernée par les paparazzis. Qu’il s’agisse des habitants de la ville ou de touristes de passage, les gens s’arrêtent toujours devant la demeure, intriguée par ce qu’elle renvoie. Je n’habite pas très loin non plus. T’as pas envie de lui dire qui tu es, tu veux pas qu’il prenne peur en découvrant que tu es la fille d’un influant homme politique. Ou pire, il pourrait vouloir escroquer ton père et le faire chanter. Des tonnes de scénarios de ce genre te passent par la tête en quelques secondes à peine et tu fronces les sourcils, légèrement inquiète. Quand tu remarques qu’il ne t’a pas quitté des yeux, tu te forces à lui sourire et replaces une mèche de cheveux derrière ton oreille. Qu’est-ce que tu veux faire plus tard, enfin je veux dire, t’as déjà réfléchis à ta spécialité ou pas ? C’est un sujet que vous n’avez pas vraiment abordé, tu sais ce qu’il étudie parce que tu la compris au fil de vos messages, mais il ne t’en a jamais vraiment parlé.

Tu ne sais pas qui elle est. Tu aimerais tellement en savoir plus sur elle. Ce qu’elle aime. Ce qu’elle fait de ses journées. De son temps libre. Ce qu’elle a fait dans le passé. Si elle est plutôt bonne élève. Si elle a déjà eu des petits copains. Tu aimerais tout connaitre d’elle. C’est plutôt étrange comme situation. Soudain, elle te demande dans quoi tu aimerais te spécialiser. Toi-même tu ne sais pas trop. « Je ne sais pas, je suis partager entre sauver la vie des gens et aider à donner la vie… Je ne sais pas si j’ai envie d’être chirurgien, médecin urgentiste ou bien même gynécologue ! » Il y a tellement de possibilité. Tellement de spécialités différentes, plus les unes que les autres. Tout dépend ce que l’on aime dans le métier. Tu sais que tu pourrais aussi devenir médecin légiste, mais tu ne sais pas si tu es prêt à être entourer de cadavre toute ta vie, parce que toi, ce que tu aimes, c’est le contact avec les gens. Et puis, ta spécialité, dans le fond, tu ne l’as choisiras pas vraiment, puisque ça dépendra des notes que tu obtiendras. Au pire, tu deviendrais médecin généraliste et tu t’occuperas de grippe, gastro et rhume toute ta vie.

Assise près de lui, tu joues avec les brins d’herbe entre tes jambes, les enroulant à l’infini autour de tes doigts sans les arracher. Tu lui lances un sourire rayonnant en l’entendant parler de son futur métier. Quoique tu décides, tu deviendras une sorte de super-héros en blouse blanche, j’en suis sûre. Ça t’intrigue tout ça, t’aimerais bien le voir dans son élément, porté une blouse, être concentré. Tu te demandes à quoi il ressemblent quand il se concentre, est-ce qu’il fronce les sourcils, est-ce qu’il s’occupe les mains pour avoir l’esprit totalement libre, est-ce qu’il tape du pied ou s’isole de tout le reste ? Tu te tournes ensuite vers lui pour lui faire face, tes genoux frôlant les siens, tu te sens plus à l’aise d’un coup. C’est peut-être le fait de savoir qu’il veut sauver des vies, tout de suite, tu te dis qu’il ne pourra pas te faire de mal. Puis finalement, tu repenses à Dexter et souris, Marlon n’a rien à voir avec lui. Moi j’aimerais devenir traductrice littéraire, ce qui me plairait, ce serait de lire des livres en avant-première et de les traduire pour que tout le monde puisse y avoir accès. T’as confié ça de toi-même, sans qu’il ne pose aucune question. Comme quoi, tu te sens vraiment plus à l’aise d’un coup.

Les choses avancent avec Lara. Tu sens qu’elle est plus à l’aise et d’un coup, ça te mets toi aussi plus en confiance. Un jour, tu as songé à devenir médecin pour les enfants, les faires rires, les aider à ne pas avoir mal, leur faire comprendre que la vie n’est pas fini. Mais, tu t’es rendu compte qu’il fallait avoir beaucoup de caractère pour travailler avec les enfants, qu’il fallait savoir prendre du recul et ne pas trop s’attacher à eux. Et ça, tu en étais incapable. Tu t’attaches trop vite aux gens, tu es trop empathique. Alors tu as laissé de côté l’idée de devenir un jour pédiatre. Soudain, sans que tu t’y attendes, Lara se dévoile un peu plus à toi, sans que tu ne lui demandes quoi que se soit. Elle te révèle ce qu’elle veut faire comme métier, pourquoi elle fait ses études en littérature. « C’est chouette comme métier. Tu les traduirais de quelle langue à quelle langue ? Tu saurais en avance si un livre peut être un best-seller en fait, c’est plutôt classe ! » C’était un métier hors du commun, un métier que l’on souhaite faire vraiment que quand on est passionné de littérature, ce n’est pas à la porter de tout le monde de faire ce métier.