don’t ask me why. (diana)

Il est neuf heures du matin lorsque Quinn passe la porte de chez lui. Il a passé la nuit là, non. Il avait préféré faire un tour en ville, oublier ce qui pouvait l’emmerder. Il ferma la porte doucement derrière lui, pour ne pas réveiller sa petite famille. Enfin, petite famille. C'est un grand mot. Mais il a pas envie d'y penser, à quoi ça servirait, à part sentir encore cette douleur ? Il y pense souvent à cette histoire de paternité, de fiançailles. Ça le fait doucement rire. Peut être qu'il aurait pu comprendre, si Diana lui avait dit la vérité, si elle lui avait dit, des les premières semaines qu'en fait, sa fille n'était pas de lui. Il l'aime quand même, sa fille. Ça ne change rien. Diana ? C’est une autre histoire. Il laisse ses chaussures traîner au milieu de l’entrée, passe par la cuisine. La tête encore un peu dans le brouillard, il actionne la machine à café. Il jure alors qu’il se rappelle qu’elle est assez bruyante, cette foutue machine à café. Peut être pas assez pour la réveiller mais assez pour lui donner un mal de tête supplémentaire. Tant pis. Il en a besoin. Il se voit pas tenir autrement, il aurait trop rapidement fait de s’endormir sur le canapé. C’est tentant en même temps. Se laisser glisser sur le canapé, fermer les yeux, dire bonjour à Morphée. Il se saisit de sa tasse, retint un cri lorsqu’il marche sur ce qu’il semble être un jouet de sa fille. Il est certain qu’elle lui a posé un piège, ou peut être qu’il est un peu parano avec toutes ces histoires Quinn. Il se mord la lèvre, shoote dans le jouet pour l’envoyer un peu plus loin. Il finit par se poser dans ce fameux canapé. Quinn boit un peu du breuvage brunâtre. Sa main laisse la tasse estampillé « père de l’année » sur la table basse. Quelle bonne blague quand il y pense quand même. Il finit par s’allonger, les pieds qui dépassent du bout, par fermer les yeux. Il est pas assez fatigué pour s’endormir, dommage. La seconde option, c’est d’aller prendre une douche, de se débarrasser de cette odeur qui se dégage de lui. Comme lorsqu’il est rentré, il avance à pas feutré jusque dans la salle de bain et finit par se glisser sous la douche. Sans les vêtements, bien sûr. L’eau lui fait du bien.

Quinn laisse l’eau chaude glisser sur son corps, il ferme les yeux, sent ses muscles se dénouer. Le bruit de l’eau sur le sol ne l’empêche pas d’entendre les pas de sa fiancée, la buée ne l’empêche pas de la voir s’immobiliser devant la douche. Il tourne les yeux, il a pas envie de la voir. Il se contente de finir ce qu’il a commencé. Il se rince, est quand même obligé de sortir de la salle de bain. Le changement de température le fait frissonner. Le brun sort de la douche, s’empare de la première serviette qu’il trouve. Il s’essuie le visage, frotte ses cheveux avant de passer la serviette autour de sa taille. Il remarque alors qu’il a un bleu, jusque au dessus de sa hanche droite. Je suis rentré. Il répond alors à son affirmation. Il était rentré et en plus, ils se croisaient. Le destin ne faisait il pas bien les choses ? Et pour la première fois depuis qu’elle est venue, il prend le temps de la regarder. Elle est belle, sa fiancée, il ne peut le nier. Même en sortant du lit, avec la certitude qu’elle n’avait pas eu une nuit très reposante, elle restait belle. Il ne prit pas la peine de lui expliquer pourquoi il lui avait fait défaut cette nuit, c’était toujours la même réponse. Le boulot, saloperie de boulot. Alors ouais, il y avait un peu de boulot, mais il y avait aussi beaucoup de cette envie de fuir son quotidien, d’oublier un peu qu’il était Quinn Aterton. Il arrivait à cet extrême ou parfois, il avait envie d’être quelqu’un d’autre. Au fait, tu m’as pas raconté comment ça s’est passé avec l’architecte. Il demanda alors en la contournant et en sortant de la salle de bain. Il entre dans leur chambre, voit la petite encore assoupie sur leur lit. Il esquisse un sourire, comme si toute sa colère c’était envolée d’un coup. C’était pas de sa faute, à sa fille, la fautive, il le savait, c’était la mère. Il s’empara d’un tshirt blanc, de sous vêtement et d’un jogging, ça suffirait pour trainer comme il le voulait à la maison. Il eut au moins la décence de retourner dans la salle de bain pour s’habiller avant d’enfin se poster en face de sa fiancée. Quinn est fuyant, il veut pas aborder le sujet qui fâche.

Les plans sont pas mal du tout. Il a fait du bon boulot. Et pour la première fois depuis qu’il est rentré, Quinn esquisse un sourire. Ça lui fait déjà ça en moins à s’occuper. Si Diana a validé les plans, c’est que c’est bon, il peut au moins lui faire confiance sur ça. Il rentre dans la chambre, s’appuie contre le cadre de la porte. Ça aussi, cette vision, ça le fait sourire. Sa fiancée serrant leur fille dans ses bras, la berçant, pendant qu’elle se réveille doucement. Il l’avouera jamais, mais ça lui manque quand même un peu, de ne pas être présent. Mais c’est pas de sa faute, il supporte pas trop de rester dans la même pièce que Diana, c’est pour ça, qu’il fuit la chambre conjugale. Il passe une main sur son visage, chasse la fatigue qui essaye de s’y installer. Pourquoi ? Parce qu’il travaille trop bien ? Il demande en fronçant les sourcils avant de lâcher une moquerie. C’est plus fort que lui. Il voit pas où le problèmes. Si les plans sont bons, s’il fait du bon boulot, pourquoi ils ne pourraient pas le garder ? Il quitte le cadre de la porte, vient s’assoir à côté d’elle, essaye de faire un effort pour ne pas paraître trop froid. Il doit essayer de tenir une conversation sans lever le ton. Je vois pas où est le problème. Il continue en posant les yeux sur leur fille. Il essaye de déceler les potentielles ressemblances entre eux, à chaque fois qu’il la voyait. C’était douloureux, de ne pas avoir su avant. Il finit par plonger ses yeux dans ceux de Diana, attendant une réponse.

Il attend la raison, la fameuse raison pour laquelle ils devront changer d’architecte. Le fait est que Quinn aime pas être contrarié, surtout en ce moment. Il voit sa grimace, préfère ne rien renchérir, elle aurait été capable d’attraper la lampe de chevet pour la lui lancer à la tête. Il savait qu’il était pas tendre en ce moment, qu’il lui en faisait voir de toutes les couleurs. Mais c’était surtout le temps d’avaler la pilule. Ou peut être qu’il se rendait doucement compte que leur couple ne rimait finalement pas à grand chose. Il savait pas et pour l’instant, il préférait ne pas savoir. Il gardait juste sa colère au fond de lui, la laisser prendre la place qu’elle voulait, s'installer tranquillement dans son cœur, prendre la place de la douleur. Il fronce les sourcils quand elle lui dit enfin que c’est son ex. Il la regarde passer une main dans les cheveux de la petite tandis qu’elle baisse les yeux. À ce point ? J’veux dire que même si vous étiez ensemble, vous devriez avoir assez de tenu pour ne pas vous étriper ou vous sauter dessus, je veux cette architecte Diana, c’est lui qui a fait les plans, c’est lui qui doit s’occuper de la maison. Il expliqua alors, tout aussi calmement qu’elle. Ils étaient des adultes, ils étaient capables de se contenir, ils n’étaient plus des adolescents aux hormones affolées. Et puis si c’est juste ça, je m’occuperais de l’architecte, je ferais en sorte de me libérer du boulot, t’auras plus à aller le voir, sauf pour quelques détails. Il propose avant de finalement basculer en arrière sur le lit. Il s’allonge, regarde le plafond blanc de leur chambre. Il se demande alors, si c’est lui, l’architecte, le père de sa fille. Quinn se fait des films, il commence à devenir parano. T’avais quelque chose de prévu aujourd’hui ? Il demande alors, pour clore le sujet. Il avait aucune envie que le sujet de l’architecte occupe sa matinée, c’était peut être le moment de pardonner un peu à Diana. De faire des efforts. Peut être.

Il en a, des exs, comme tout le monde. Il a rencontré d’autres femmes avant Diana, des femmes que ses parents ne lui ont pas présenté. Il les rencontrait rarement, ou alors dans le plus grand des hasards. Quelques mots polis et c'était terminé, il n’en entendait plus parler. Ou alors parfois dans les magasines, le scandale de l’une, la réussite de l’autre. Quelle ironie du sort que leur architecte soit un ex de sa fiancée. Non, vraiment, le destin était farceur quand il s’y mettait. Jusqu’en il apprenait qu’il n’était pas le père, juste quand il commençait à déchanter, il apprenait aussi qu’ils allaient cotoyer son ex. Mais au fond, ça lui importait peu. Il sollicitait ses talents, pas leur passé commun. Il voulait ses plans, il voulait que ça soit lui qui fasse leur maison. Alors ça serait lui. Message reçu, je t’exempte de rendez vous chez l’architecte. Il répond alors qu’un léger sourire se pose sur ses lèvres. Il trouverait presque ça suspect, qu’elle dise qu’elle ne veuille plus le voir avec tant d’acharnement. Mais Quinn laisse couler. De toute façon, avec ses absences et ce nouveau trait de caractère je-m’en-foutiste qui l’avait atteint, il avait pas son mot à dire sur la façon dont elle pouvait parler. Il bascula en arrière, éclata de rire quand sa fille atterrit sur ventre, il en profite pour lui faire des chatouilles. C’est ça qui lui manque, pendant ses absences, le rire de Kate. Non, je reste avec vous. Il répond alors avant de se redresser, mettant Kate sur ses genoux. Ça fait longtemps qu’on a pas fait un truc tous les trois. Il se sent quand même un peu coupable Quinn, le temps de quelques secondes, de délaisser sa famille, de se comporter comme un connard. Ça se dissipe vite, mais c’est quand même là, parfois. Il finit par se lever, charger la gamine sur son épaule avant de se diriger vers la cuisine.

D’accord, l’imitation le fait rire. Mais il peut pas juger, l’architecte, il ne lui a parlé qu’au téléphone. Et sûrement que leur relation ne sera pas la même qu’avec Diana. Il ne sait pas comment leur relation s’est finie mais pour que ça se passe comme ça, ça ne devait pas être extrêment joyeux. Mais qu’importe, c’est pas vraiment ses affaires. C’est du passé, non ? Il garde Kate sur son ventre, s’amuse à prendre de grande respiration pour la soulever un peu. Et la petite éclate de rire. Il passe une main dans ses boucles brunes, soupire malgré lui. Il savait que malgré ça, il pouvait faire des efforts, tenir un peu mieux cette image de famille parfaite. Mais quand il voit Diana, il ne peut que se rappeler de la trahison, il ne peut que se braquer. Si seulement elle lui avait dit, avant la naissance, qu’elle n’était pas de lui au lieu de s’enfoncer dans ce mensonge. Les choses auraient été différentes. Je sais, j’en suis désolé. Il se contente de répondre avant de se lever, leur fille dans les bras. Ils étaient heureux, avant le test ADN. Des vacances à soleil, à profiter de l’autre, à fêter leurs fiançailles. Du bonheur. Est ce que tout avait été balayer d’un revers de la main à cause de ça ? Il ne savait pas quoi en penser. C’était confus dans sa tête. Il pose Kate sur le canapé, allume les dessins animés. Il regarde sa fiancée faire la pâte, il lui sourit, aussi. Il essaye d’oublier, de faire comme si rien ne s'était passé. Ça me semble une bonne idée, un dimanche tranquille. Il contourne le plan de travail, il a du mal à faire des gestes tendres, des gestes dont il avait l’habitude avant. Et toi, comment tu vas ? Raconte moi. Il demanda finalement en la regardant s’activer, l’air sérieux. Parce que finalement, la conversation avait surtout tourné autour de l’architecte et de son boulot, c’était le moment de s’intéresser à autre chose qu’à lui.