one step closer. (félix)

Aoife avait quitté l'appartement en début d'après-midi, comme chaque mercredi. En sortant de la station de métro, elle s'était perdue dans les rues, à pieds, tout en sachant très bien où elle allait. La librairie du Queens, celle dans laquelle elle s'était arrêtée par hasard peu après son arrivée dans la Grosse Pomme. Quand on y pense, ce n'est pas le plus pratique pour elle, devant traverser bien des quartiers pour y arriver. Elle ne savait pas vraiment ce qui la poussait à aller jusque-là, mais elle le faisait deux fois par semaine. La curiosité ? Un sentiment de solitude qui lui était étranger auparavant ? Ce qui est certain, c'est qu'elle y va particulièrement le lundi et le mercredi parce qu'elle sait qu'elle le verra. Il l'intrigue... Il est différent des autres garçons, de celui qu'elle a laissé derrière elle entre autres. Mais elle sent que ce n'est pas qu'une question de choc des cultures, que c'est autre chose. Elle veut savoir, elle veut le connaître sans même savoir où ça la mènera. Ses cheveux blonds, elle les replace correctement avant d'entrer dans le magasin. Elle a toujours cette même démarche, pleine d'assurance, un beau sourire et le regard pétillant. Perchée sur des bottines qu'elle s'est empressée de sortir, avec l'automne qui pointe le bout de son nez, elle le domine presque de quelques centimètres. Elle le voit de dos, et son sourire ne s'efface pas. Il est dans le rayon favori d'Aoife, qui plus est, celui des livres d'art. La sublime couverture d'un ouvrage sur l'oeuvre de William Turner attire son regard quelques instants, avant que ses yeux clairs ne se posent de nouveau sur le jeune homme. « Bonjour. » lance-t-elle gentiment, le ton peut-être plus charmeur qu'à l'accoutumée. Avant, elle n'aurait certainement pas eu l'idée de s'intéresser à ce genre de garçon, visiblement trop réservé pour elle. Elle, la grande gueule à l'esprit révolutionnaire. Elle se pose même des questions sur le goût de ses lèvres. Mais pourquoi ? « T'as quelque chose de nouveau pour moi aujourd'hui ? » demande-t-elle, volontairement familière avec le jeune homme.

Comme à son habitude, l'américain était présent le mercredi à la librairie du Queens. Il y fait des remplacements souvent mais pour l'instant, il y était comme simple client. Installé dans un rayon en particulier, il attendait que la belle fasse son entrée dans la librairie comme tous les mercredi et lundi. Enfin bref, il était à fond dans un livre qu'il venait tout juste de prendre -et il pensait sérieusement à le ramener à la maison pour le lire tranquillement. Son attention fut reportée sur l'arrivée de la demoiselle, elle le salua. Un léger sourire se dessina sur ses lèvres. " Bonjour, comment tu vas ? " dit-il en souriant doucement. Il pose son regard sur son livre une nouvelle fois avant de réfléchir quelques instants à sa question. " Il y a une théorie qui dit qu'un bébé dans le ventre de sa mère aurait toutes les connaissances du monde. Les anges leur auraient dit de se taire en posant leur doigt sur leur bouche. Voilà pourquoi ils auraient un pli en-dessous de leur nez et au-dessus des lèvres. " dit-il en posant ses doigts sur ses lèvres pour lui montrer l'image. Il rigole par la suite en secouant la tête. " C'est très religieux " et très imagé mais plutôt enfantin.

Venir à la librairie le mercredi, c'était devenu une tradition pour Aoife. Observatrice, elle n'avait pas manqué de remarquer qu'il était toujours présent ce jour-là. Elle entre avec une certaine assurance, comme toujours. Elle ne saurait même pas dire pourquoi elle accorde autant d'intérêt à ce garçon, trop différent de ceux qui lui plaisent d'habitude... Et puis, sa rupture reste assez récente, ce n'est pas sain. Mais bon, elle le salue avec un bon sourire. Un de ces sourires qui ne laissent pas les garçons indifférents. C'est à peine si elle se contrôle. Il lui demande comment elle va, et elle ose espérer que ce n'est pas par simple politesse. « Je vais bien et toi ? » demande-t-elle en retour, intéressée, même si elle se doute qu'il ne va pas s’épancher sur le sujet. Cela fait plusieurs semaines qu'elle vient ici, et elle ne connaît rien de lui au final. Elle lui demande ce qu'il a de nouveau. Des livres qui pourraient l'intéresser, parce qu'il doit connaître ses goûts désormais. Il lui parle alors d'une théorie, fort religieuse au goût d'Aoife. Ça la ramène à des souvenirs de sa terre natale. Les dimanches matins à l'église, les repas de famille qui suivaient. Et pourtant... Elle se prend à aimer cette théorie-là, comme quoi ce sont les anges qui dessinent le petit creux entre le nez et la bouche des bébés. Elle sourit, rit un peu quand il mime le geste. « Et tu y crois ? » l'interroge-t-elle, s'intéressant à son côté spirituel. Elle, elle a une relation étrange à la religion désormais... Elle a grandi dans une famille qui y croyait avec ferveur, tellement que leurs principes étaient parfois trop carrés pour elle. Parce que le monde n'est plus le même, qu'il y a des choses qui ne doivent pas suivre ces principes-là. Et en même temps, au fond d'elle, elle croit que quelqu'un veille sur elle. Un ange gardien, peut-être. « Tu viendras boire un café avec moi quand tu auras fini ? » C'est sorti comme ça. À quoi bon tourner autour du pot plus longtemps ?

Félix était plongé dans son libre quand la jolie blonde fit son apparition. C'était une habitude, elle y venait tous les lundi et mercredi, dans les alentours de la même heure. Pourtant le faux brun n'avait pas fait attention à l'heure et fut plus que surpris quand elle s'arrêta à ses côtés. Il la salua par politesse et lui demanda si elle allait bien. " Je vais bien merci " dit-il en souriant doucement. Finalement, il ouvrit la bouche pour sortir une théorie qu'il avait lu récemment -et Dieu sait qu'il sortait toujours ce genre de chose quand il était mal à l'aise. Quand il eut terminé, il posa son regard sur elle alors qu'il se maudissait intérieurement d'avoir sorti une connerie pareille. " Pas vraiment nan, je ne suis pas quelqu'un de très croyant. Je trouvais cette théorie intéressante et mignonne. " dit-il en haussant les épaules. Il était surtout curieux de tout en réalité, il aimait lire et essayer de comprendre certaines théories assez étranges. " Euh oui, enfin je ne travaille pas aujourd'hui, j'étais venu faire un projet et je l'ai terminé. " dit-il en souriant doucement. Au fond de lui, il était en panique n'ayant pas pour habitude de se faire inviter par une demoiselle, surtout la jolie blonde. Physiquement, elle était très jolie mais à voir si c'était juste de l'attirance.

A force de se voir, ils se reconnaissent, deviennent plus familiers l'un avec l'autre. Et puis Aoife, elle est un peu perdue entre ce qu'il suscite chez elle, et ses propres doutes. Cette assurance qu'elle dégage est mensongère, parfois. Enfin, elle va bien malgré tout, lui aussi apparemment. C'est tout ce qui compte. Elle cherche à savoir ce qu'il a de nouveau pour elle, et il lui parle d'une théorie. Elle a bien aimé l'écouter. En vérité, elle aime toujours écouter ce qu'il a à dire, et elle le fait toujours en étant très attentive – faisant taire ce côté bavard qu'elle a souvent. Elle lui demande alors s'il croit à ce genre de choses. Ça l'intéresse, et les débats ne sont pas pour lui déplaire. Il dit ne pas être croyant, et étrangement, ça la rassure un peu. Peut-être parce qu'elle a trop baigné dans toutes ces choses... « J'aime bien aussi. Merci de l'avoir partagée avec moi. » répond-elle avec le sourire, toujours curieuse des choses nouvelles, peu importe ce qu'elles concernent. Elle est ouverte d'esprit, Aoife, tellement qu'elle n'a aucun tabou. Pas beaucoup de filtres non plus parfois. Et c'est même naturellement qu'elle lui demande s'il viendra boire un café avec elle quand il aura fini. Elle espère que oui, et elle ne pense pas un seul instant qu'il puisse être venu pour une autre raison que ce petit boulot. Il lui dit être venu pour un projet et avoir terminé. C'est un oui, alors ? C'est ce qu'elle se dit. Et puis il ne se braque pas. Il lui sourit aussi. Après tout... On ne dit jamais non à la blonde, mais avec lui, elle a eu peur quelques secondes. Parce qu'il a ce quelque chose de différent, qu'elle ne comprend pas. « Oh... Moi qui pensais que tu étais venu pour moi. » lance-t-elle l'air de rien, avant de lui adresser un sourire taquin. « On peut y aller ? » demande-t-elle, enjouée.

Bien sûr, il a de quoi faire peur l'américain, il a tendance à sortir tout ce qui lui passe par la tête. Il a sûrement fait peur la demoiselle, pas au point de la faire fuir mais au point de se demander s'il était bien net. A croire que les jumeaux Gaudreault ont pas mal de problème interne. " Je suis contente que cela te plaise " Même si ça aurait fait peur la plupart des autres personnes. Elle lui proposa finalement de boire un café en sa compagnie, si cela le surpris au début, il accepta rapidement. Après tout, il ne travaillait pas aujourd'hui. Le faux brun grimaça doucement avant de passer une main derrière sa nuque. " Je savais que tu viendrais aussi aujourd'hui " dit-il en souriant doucement. Il approuva de la tête quand elle lui demanda s'ils pouvaient y aller maintenant. " Bien sûr mais il faut d'abord que j'aille chercher mes affaires " dit-il en lui montrant la table où il était installé. Il rangea le livre qu'il avait en main avant de finalement partir attraper son sac à main. " Tu veux aller où ? " dit-il alors qu'ils sortaient tous les deux de la bibliothèque. Il ne faisait pas chaud dehors, il faut dire que l'automne commençait à vraiment montrer le bout de son nez.

Aoife l'a souvent trouvé étrange, le jeune homme. Un peu comme dans un monde à part, ou du moins pas dans le même qu'elle. Ça l'intrigue, ça l'attire sans qu'elle ne sache comment lutter. Comment se raisonner pour arrêter de venir dans cette librairie, chaque lundi, chaque mercredi. Pourtant elle est là, à dire qu'elle aime bien sa théorie du jour. Elle la trouve mignonne, en réalité. Racontée par quelqu'un d'autre, elle ne l'aurait sûrement pas vue du même œil, mais ça, elle n'y pense pas sur le moment. Elle sourit seulement, et elle parle d'aller prendre un café. Il semble disponible, dit qu'il était venu pour travailler. Pas pour elle ? Elle serait presque déçue, la blonde. Il avoue finalement qu'il savait qu'elle viendrait aujourd'hui, et elle sourit de plus belle. « Attention, je pourrais croire que tu m'espionnes... » souffle-t-elle. Et le pire, c'est que ça lui plairait, d'être un peu dans sa tête. En tout cas, elle pensait qu'il serait plus timide, mais il a l'air prêt à partir avec elle, le temps d'un café. Peut-être plus si affinités. Elle hoche simplement la tête, le laisse récupérer ses affaires laissées un peu plus loin. Elle patiente, jette encore un œil à ce livre qui l'intéresse. Elle le prendra probablement lundi prochain. Il revient vers elle, lui demande où elle veut aller alors qu'ils prennent le chemin de la sortie. Elle hausse les épaules, serre un peu son sac contre son flanc en sentant l'air glisser dans sa veste. Les températures baissent, et il y aura peut-être même de la neige dans quelques semaines. « Je sais pas, je connais pas trop le quartier. Un endroit que tu aimes bien, je te laisse guider. » répond-elle. Ça l'intéresse, de savoir quels endroits il peut bien fréquenter. Elle se demande s'il aime sortir, ou s'il est plutôt casanier. Elle, elle alterne les deux selon les envies du moment.

Bien sûr que Félix savait quand la jolie Aoife venait à la bibliothèque, il était assez souvent dans cet endroit pour savoir les habitudes des habitués. " Cela fait de moi quelqu'un de très observateur, nuance " dit-il en rigolant doucement. Finalement, Félix rangea toutes ses affaires avant de la suivre en direction de la sortie. C'était bien la première fois qu'ils allaient se voir en dehors des murs de la bibliothèque, il en était un peu nerveux l'étudiant. Elle ne connaissait pas le quartier mais semblait pourtant bien connaître la bibliothèque. " Très bien, je sais où aller alors " dit-il en lui faisant signe de venir avec lui. Il se dirigea vers le petit café où il avait l'habitude de venir manger quand il n'a pas eu le temps de préparer son repas lorsqu'il travaillait. Ce n'était pas cher et plutôt bon, l'ambiance était agréable et il était plutôt simple d'avoir une discussion dans ce genre d'endroit. " Je viens souvent ici " dit-il en s'installant à sa table habituelle. La belle en fit de même en face de lui. Il appela finalement le cerveau d'un signe de la main. " Un café macchiato s'il vous plait et … " dit-il en posant son regard sur la jolie blonde, attendant qu'elle choisisse ce qu'elle souhaitait boire.

Aoife avait pris l'habitude de venir ici, chaque lundi et chaque mercredi. Jamais elle ne manquait une occasion de venir, rien que pour le croiser. Alors elle le taquine, feint une moue un peu déçue quand il dit être venu pour travailler sur un projet, pas pour elle. Mais elle retrouve le sourire, en l'entendant dire qu'il a remarqué qu'elle venait assez souvent. Elle ne fait pas plus de commentaires, l'attend avant qu'ils prennent le chemin de la sortie. Pour aller ailleurs, elle n'a pas vraiment d'idée et choisit de le laisser guider. Elle veut connaître ses habitudes, ce qu'il aime. Ça l'intéresse. Elle aurait peut-être davantage cherché à guider si ça avait été un autre jeune homme, mais lui, c'est probablement parce qu'elle a du mal à le cerner. « Je te fais confiance. » dit-elle gentiment, quand il assure savoir où aller. Elle ne connaît pas vraiment ce quartier en vérité, même le sien lui semble bien trop vaste, comparé à la capitale irlandaise dont elle connaissait les moindres recoins. Ils arrivent en quelques minutes, et il les emmène à une table. Elle s'assied face à lui, regarde un peu autour d'elle. « C'est vraiment mignon ici. » Elle apprécie le cadre, c'est cosy, simple et joli à la fois. Aoife est de ces filles sans chichi. Il appelle rapidement le serveur, passe sa commande avant de la laisser faire à son tour, « Un chocolat chaud s'il-vous-plaît. » demande-t-elle poliment. Le serveur parti, elle reporte son attention sur Félix. Elle se retrouve un peu pantoise, ne sait pas vraiment quoi lui dire. C'est assez paradoxal quand on y pense. Il y a pourtant mille sujets de conversations à aborder, d'autant plus avec quelqu'un qu'on ne connaît pas, mais elle ne sait pas par où commencer. Comme si elle perdait d'un coup son assurance. « Tu travaillais sur quoi tout à l'heure ? » demande-t-elle. C'est vrai qu'elle ne sait même pas ce qu'il étudie. Et au fond... ça lui fait du bien, ce sentiment de tout recommencer.

Le moment du café était venu, Félix n'hésita pas à l'emmener dans le petit café où il avait l'habitude d'aller. Un endroit calme, pas trop cher et plutôt sympa, il aimait y aller pour ses pauses déjeuners quand il ne prenait pas son repas. Le regard posé sur elle, maintenant qu'ils étaient installés à la table. " C'est très agréable, j'y viens souvent pour lire et prendre mon repas du midi " dit-il en souriant doucement. Il prit sa commande, attendant que la demoiselle en face de même. Une fois la commande prise, le silence reprit place entre les deux. Félix n'était pas d'un grand bavard quand il ne connaissait pas, elle était jolie aussi mais ça ne voulait pas dire que ça marcherait forcément. " Je travaille sur les réactions du corps humains sur les différents produits. On essaye de trouver des produits écoresponsables. " dit-il en haussant les épaules. Ce n'était pas très intéressant, il préfère honnêtement être dans ses recherches en laboratoire. " Et toi ? Tu étudies quoi au fait ? " Nan parce qu'il n'y a jamais vraiment penser et questionner. Il la voyait bien dans un secteur littéraire, mais faut-il encore savoir lequel. Félix a toujours été attiré par la science mais il appréciait également les moments avec les livres et la littérature -surtout celle française.

C'est lui qui guide, et elle ne va certainement pas se plaindre de l'endroit dans lequel il l'emmène. Un petit café, joliment décoré. Elle apprécie le cadre, et d'autant plus en sa compagnie. Elle ne le quitte pas des yeux, quand ils sont installés l'un face à l'autre. Elle prend note, quand il lui dit venir pour lire et déjeuner. Elle y viendra plus souvent, pour avoir une chance de l'y croiser. C'est étrange de penser comme ça, n'est-ce pas ? Elle ne le connaît pas vraiment, pourtant. Elle lui rend son sourire, puis ils commandent. Elle entame la conversation, lui demande sur quoi il travaillait. Elle l'écoute attentivement, s'intéresse à ce qu'il fait. Sensible à bien des grandes causes, elle aime savoir qu'il s'intéresse à l'écologie. « C'est cool ! Ça avance comme tu veux ? Ça te plaît ? » demande-t-elle avec curiosité. Ils ont l'air différent, rien que par leurs études, mais ça ne veut pas dire qu'ils ne peuvent pas s'entendre. Elle s'intéresse à tout, elle aime bien poser mille questions même si elle se canalise pour ne pas trop en poser à la fois. Il lui demande à son tour ce qu'elle fait. C'est vrai qu'ils se parlent souvent, mais jamais vraiment d'eux. Ils ont tout à apprendre, et c'est agréable, cette impression qu'elle peut repartir de zéro ici. Il y a des chances pour qu'elle ne rentre jamais chez elle. « Je suis en doctorat de l'histoire de l'art. C'est vraiment intéressant. » répond-elle. Il y a beaucoup de travail, et elle ne s'en plaint pas. Elle entend bien être au top au niveau des connaissances, et ne rechigne pas à apprendre, même au milieu de la nuit s'il le faut. « T'as sûrement deviné que je suis pas d'ici. » ajoute-t-elle en souriant, sachant bien qu'elle a un accent qu'on reconnaît tout de suite. Puis son prénom qui ne trompe pas non plus sur ses origines.

Est-ce que ça lui plaisait ? Bien sûr que oui, il adorait les sciences même s'il préférait être en labo plutôt que décrire des paragraphes pour blablater. " Je préfère être dans les laboratoires que d'écrire des pages et des pages de recherches mais dans le fond, j'aime beaucoup ce que je fais. Je veux découvrir des moyens écoresponsables pour protéger la planète. " dit-il en souriant doucement, sa commande étant en cours de préparation. Il se souvient alors qu'il ne savait même pas ce que Aoife faisait dans la vie. Elle était certainement étudiante mais tout de même. " En doctorat ? Je suis loin derrière dis-donc. " dit-il avec un léger sourire aux lèvres. Il avait un décalage d'âge tout de même. " Tu comptes faire quoi plus tard avec ton doctorat ? " dit-il curieux. Elle voulait certainement faire des recherches, conservatrices dans un musée ou encore être prof. Il n'en savait rien, mais elle avait un peu de choix avec ces matières. " Oui, ton accent est tout sauf américain comme le mien. Tu dois être européenne, un pays vers l'Angleterre mais tu n'es pas anglaise. " Ca non, il le connaissait bien l'accent anglais et elle ne l'avait pas. Peut-être écossais ou irlandais, il n'en savait trop rien. " J'ai jamais quitté le coin de New-York tu sais, alors j'ai dû mal à reconnaître les accents. " dit-il en haussant les épaules. Finalement, leur commande arriva et il n'hésita pas à prendre une petite gorgée, bien que ça soit trop chaud.

Aoife est curieuse. Tout ça, c'est nouveau pour elle. Cette ville, les nouvelles personnes. Félix surtout. Il est différent des garçons de chez elle, différents des américains qu'elle a pu rencontrer dès son arrivée. Elle ne sait pas bien pourquoi. Il l'intrigue et elle pose des questions. Elle se laisse porter par le côté agréable de la nouveauté. Il lui confie préférer être dans les laboratoires, et après tout, c'est l'image qu'on a souvent des scientifiques. « J'imagine qu'il faut un peu des deux de toute façon. Tu vas te spécialiser dans l'écologie alors ? » demande-t-elle. Elle, ça l'intéresse toutes ces causes-là. Féminisme, protection de la faune et de la flore... Un peu tout le reste. Elle a le cœur généreux, l'envie d'aider tout le monde, de résoudre les problèmes de la planète à différents niveaux. À son tour, elle lui explique ce qu'elle fait de sa vie. Aujourd'hui, elle est en doctorat. Le temps passe vite, n'est-ce pas ? Elle trouve ça fou, en réalité. « Pourquoi ? Je suis si vieille que ça ? » lance-t-elle pour le taquiner. Ça se voit qu'il est un peu plus jeune qu'elle, mais ça ne choque pas non plus. Après tout, elle a toujours ce visage un peu enfantin qui fait qu'on ne lui donne parfois pas son âge. « J'aimerais bien faire de la recherche, des bouquins, des conférences... Je sais que ça peut avoir l'air un peu casse-gueule dit comme ça mais bon, ça a toujours été ça. » dit-elle avec le sourire. Elle veut y arriver. Elle bosse comme une damnée pour ça, Aoife. On lui a appris les valeurs du travail. En tout cas, elle a le choix dans les chemins qu'elle peut suivre. Elle lance le sujet sur ses origines, se doutant qu'on décèle un accent à chaque fois qu'elle ouvre la bouche, des expressions d'ailleurs, souvent exagérées parce que les irlandais ont tendance à exacerber ce qu'ils veulent exprimer. Enthousiastes ou pas. « Clairement pas anglaise non. » répond-elle en riant. Les anglais, les irlandais. Longue histoire, n'est-ce pas ? Ça aussi, ça l'intéresse. « Je suis de Dublin. » ajoute-t-elle, exagérant un peu son accent, pour la blague. Il lui dit ne jamais avoir quitté New York. Ça l'étonne un peu. « Tu n'as pas voyagé du tout ? » Leur commande arrive, elle remercie le serveur avant de tremper ses lèvres dans son chocolat chaud, attendant la réponse de Félix.

C'était plutôt étrange de se retrouver en face de la belle alors qu'il avait pour habitude de lui parler que très peu quand ils étaient à la bibliothèque. Ils apprenaient à se connaître et elle était plutôt intéressante la demoiselle. " Ca serait ça l'idée, trouver un moyen de moins polluer la terre avec notre activité humaine " dit-il avec un sourire aux lèvres. Il secoua la tête rapidement quand elle demanda si elle était si vieille que ça. Elle paressait avoir le même âge que lui mais ce n'était pourtant pas le cas. " Nan du tout mais je ne suis pas en doctorat, je suis encore en bachelor " dit-il en haussant les épaules. Ce n'était pas un première année, il était à sa dernière année de bachelor mais tout de même. Au final, ce n'était peut-être pas ce qu'il pensait quand il voyait un doctorat en art et en lettre. " Eh bien, si je m'attendais à ça. C'est plutôt intéressant je dois dire. " dit-il en souriant doucement. Finalement, il dût deviner les origines de la demoiselle. Il est vrai qu'ils en ont jamais vraiment parlé. Il savait déjà qu'elle n'était pas anglaise mais c'était un pays européen sans aucun doute. Il fit une grimace avant de rire quand elle intensifia son accent. " Bien sûr, une irlandaise, j'aurais dû y penser " dit-il en secouant la tête doucement. Il but une petite gorgée de sa boisson chaude, soupirant doucement quand elle lui demande s'il n'avait pas du tout voyagé. " Nan, je ne viens pas d'une famille qui a les moyens, mais je sais que mes parents sont d'Europe par contre. Je n'y ai pourtant jamais mis les pieds. " dit-il en secouant la tête. Dieu sait qu'il aimerait pourtant.

Ce moment en compagnie de Félix n'est clairement pas désagréable aux yeux de la blonde. Elle ne regrette pas de lui avoir proposé de venir avec elle. Elle s'intéresse à ce qu'il est, à ce qu'il fait de sa vie. Les questions d'écologie l'intéressent, d'ailleurs, et elle est heureuse de voir qu'ils ont ça en commun. « C'est vraiment bien. Puis on ne fait que se saborder alors qu'on voit bien ce qu'on fait à la planète. » On la regarde se dégrader, et on ne change pas d'attitude pour la protéger. Combien de disparition d'espèces encore ? De catastrophes ? Personne ne semble vraiment comprendre. À son tour, il demande ce qu'elle fait de sa vie. Elle en profite pour le taquiner, parce qu'elle est inévitablement plus âgée que lui, comme elle est en doctorat. « Ah je vois ! Ça me semble loin tout ça maintenant. » dit-elle, avec une certaine nostalgie. Elle se souvient des cours du Trinity College. Les après-midi au soleil à Saint Stephen's Green. Parfois, sa ville lui manque. Elle lui donne un peu plus de détails sur sa vie, les cours qu'elle suit. « Si tu t'intéresses aux vieilles choses, et que t'as pas peur de travailler la nuit assez souvent. » répond-elle avec un léger sourire. Aux vieux tableaux... Aux filles plus vieilles que lui peut-être aussi ? Qui sait. Après, il peut très bien avoir accepté sans avoir aucune arrière-pensée. Elle, elle assume d'en avoir. Pas forcément pour du sérieux, pas pour le moment. Elle n'a pas vraiment le temps pour ça de toute façon. Elle veut réussir ses études, et n'est pas certaine de pouvoir gérer autant de choses à la fois. Elle lui dit aussi d'où elle vient, fière de ses origines malgré tout. « T'as rien contre les irlandaises ça va ? » demande-t-elle pour le taquiner. Elle se demande comment il vit, s'il est au moins déjà allé en Europe. Y a tellement de choses à voir faut dire. Il lui avoue que sa famille n'a pas les moyens, contrairement à la sienne. « Oh vraiment ? Ils sont d'où ? » l'interroge-t-elle. Elle n'arrive pas vraiment à savoir. « J'espère en tout cas que t'auras l'occasion d'y aller un jour. »